Quelques mois après la chute de la ville-royaume d’Andara, plus de deux ans dans le passé

La journée avait bien mal commencé pour la jeune princesse en exil d’Andara. Une nuit agitée dans la rue -encore une-, un réveil difficile sous des trombes d’eau, l’estomac vide-ainsi que la bourse d’ailleurs- et pour finir une bande de sans cœur –de simples de ombres, mais dans son état…- l’avait forcée à s’abriter dans les ruelles tortueuses du Hollow Bastion.

Hollow Bastion…

En y repensant, toute la semaine avait mal débutée. Arrivée il y a de cela 6 jours maintenant et incapable de repartir –ce cristal portail avait quelques saute d’humeur apparemment- de ce monde anciennement en proie aux ténèbres, Cyn’del avait plus erré qu’autre chose, tentant de ne pas se faire voir le plus possible…en vain. Elle n’aurait pas pu tomber dans pire domaine ‘neutre’ que celui-ci.
Ses habitants étaient à cran, toujours sur le qui vive. Avoir été le repaire de Maléfique toutes ses années avait porté un terrible coup à l’ancien Radiant Garden. Le fait que Mickey avait décidé de dédoubler ce monde plutôt que d’aider à sa reconstruction n’avait pas aidé. Si seulement elle n’était pas dans cet… état pitoyable.

Elle soupira et dans cette ruelle sale du Bastion, leva son museau vers le ciel maussade.

En y repensant, tout ce mois avait mal débuté. Elle avait définitivement perdu le contrôle cette fois-ci. Elle baissa les yeux sur ses pattes, en lieu et place de ses mains. Deux immenses ‘pattes’ noires et griffues, ressemblant plus à un hybride d’humain et de loup qu’autre chose. Elle inspecta son corps, une fois encore. Un corps entièrement noir, des mains griffues ressemblant à celles des ombres, un corps filiforme, des jambes hybrides canidé-humain terminé par de grandes pattes griffues elles aussi, et l’on ajoute à ce tableau une longue queue touffue-légèrement incontrôlable-.
Elle aurait encore pu s’accommoder de cet état de fait si son visage n’avait pas été pris dans ce chaos de transformation.

Mais non.

Elle détourna le regard vers une flaque toute proche, dans un espoir vain de revoir son visage d’antan. Elle n’y vit qu’un horrible masque de loup aux dents acérées et aux deux paires d’yeux rouges vifs réduit en 4 fines lignes bridées. Cela avait été un véritable calvaire quand ces yeux supplémentaires avaient dû se connecté à son système nerveux central. Elle en frissonnait encore. Au moins, elle avait réussi à garder ses cheveux ailes de corbeau, se disait-elle, même si cela rendait le tout encore plus inquiétant.

En y repensant, tout ne faisait qu’empirer depuis la chute de son si cher royaume d’Andara. Comme la ville royaume pouvait lui manquer ! Ses aubes dorées, son palais de cristal, ses hauts murs si rassurants, ses parents… ses parents… Des larmes lui montèrent aux yeux. Elle préféra les écraser le plus rapidement possible avant qu’elles ne se mettent à couler. Pleurer ne ramènerait pas les morts.

Un mois, un mois entier qu’elle s’était fixée dans cette peau d’animal, terrorisant les habitants de chaque ville où elle avait mis les pieds. Partout, elle avait semé le chaos, bien malgré elle. Traverse Town, Paris, Saint-Pétersbourg, Agrabah, elle avait même fait un court séjour désastreux à Radiant Garden, toutes ces villes avaient finis par la chasser. Si seulement elle avait pu leur expliquer la situation… Mais dès qu’elle ouvrait la bouche, il n’y avait qu’une série de grognement sinistre qui en sortait.
Elle devait se faire une raison : Elle ressemblait à une espèce d’effrayant sans cœur poilu et personne ne viendrait l’aider, jamais.

Machinalement, elle posa ses doigts sur cette marque qui ornait son dos –ses longs bras lui permettaient de le faire aisément- et en délimita le contour. Un cœur. Ça, ça n’avait pas changé. Quelques soit la forme qu’elle prenait, cette chose était toujours gravée sur son corps, à la même place. Ce motif se retrouvait même sur sa fourrure quand elle en avait une !
Elle se releva et rabattit la capuche de sa cape bordeaux sur sa tête. Elle mourrait littéralement de faim. Elle devrait encore se résoudre à voler de la nourriture. Elle avança prudemment dans le dédalle de ruelle, adoptant plus une marche quadrupède qu’autre chose. Plus d’une fois, sa queue se balança dans un objet quelconque –une boite en carton, une poubelle, un chat- y arrachant un bruit qui lui semblait résonner dans toute la ville.

Il y avait une part de chance dans son malheur. D’après ce qu’elle avait compris, les ‘protecteurs de la citée’, grandement impliqués dans la réhabilitation du bastion, n’étaient pas présent en ce moment. Peut-être étaient-ils partis plaider leur cause auprès du roi Mickey ou qu’ils avaient autre chose à faire. En tout cas, la protection de la ville avait été laissée au très efficace système de défense anti-sans cœur qui, heureusement, n’avait rien contre elle.

Au détour d’une rue non loin de la place, elle tombe nez à nez avec un enfant, une fillette d’à peine 5 ou 6 ans. La terreur se lisait sur son visage. Elle lâcha sa glace à l’eau de mer tout juste achetée qui s’écrasa mollement sur le sol. Cyn’del voulut s’approcher, elle voulait tellement que la petite n’aie pas ce même masque de terreur que le jour où les ténèbres avait emporté sa chère Andara !

A peine avait-elle approché sa main griffue que l’enfant s’enfuit, implorant de l’aide à plein poumon. La réaction de la population ne se fit pas attendre. Rapidement, la fillette pointa ‘son assaillant’. Le système de sécurité avait une faille ! Il fallait absolument protéger la ville contre l’abomination ! Une foule compacte s’aggloméra dans la rue. Peut-être ne pouvaient-ils pas se débarrasser définitivement des sans cœur comme les porteurs de la Keyblade, mais ils pouvaient bien repousser un seul ennemis !

Ils la prirent en chasse.

La course poursuite dans les ruelles de la ville tourna rapidement à l’avantage de la multitude. Ils étaient chez eux, et comptaient bien défendre leur monde ! Ils coincèrent la princesse dans une ruelle en cul-de-sac, lui lançant tout ce qu’ils avaient sous la main : pierres, bois, insultes… Cyn’del ne chercha pas à se défendre, encaissant les coups aussi stoïquement que possible. Invoquer sa faux ne ferait qu’aggraver la situation et elle n’était même pas sûre d’arriver à la manier correctement dans son état et dans cet endroit exigu.
Elle se recroquevilla au sol, espérant qu’ils partent une fois toute leur haine déversée.

Cela faisait quelques années qu’il voyageait, maintenant. Il avait visité de nombreux mondes avec l’enthousiasme de la jeunesse. Il avait rencontré de nombreuses personnes, appris quantité de choses… Et livré des combats, bien évidemment. Il avait aussi découvert cette arme, il y avait à peu près deux années de cela. Et il lui tardait maintenant de rentrer pour raconter tout ce qu’il avait vécu à son maître. Ce voyage d’initiation était sans aucun doute la meilleure idée qu’il n’ait jamais eue ! Et il sentait que jamais il ne la regretterait, tant il s’était fait d’inoubliables souvenirs. Cependant, avant de rentrer, Zan avait voulu effectuer une dernière escale. Hollow Bastion, la Forteresse Oubliée. Il avait entendu dire que cette ville était en pleine reconstruction et il voulait aider les habitants, ne serait-ce qu’un minimum. S’il pouvait se rendre utile, il en serait heureux !

C’était donc sur cette pensée pleine d’enthousiasme et de bonne volonté qu’il se dirigeait vers la Forteresse. Il arriva sans encombre et entra en franchissant le système de sécurité qui, évidemment, ne réagit même pas à sa présence. Une fois à l’intérieur de la ville, il commença à se balader et à visiter, tout en déclarant, au fil de ses errances, qu’il était un voyageur affilié à la Lumière et qu’il accepterait volontiers d’aider quiconque en exprimerait la requête. Ce fut ainsi qu’il se prit à effectuer quelques menus travaux, qui aidaient malgré tout légèrement au réaménagement de la ville. Il décida donc de se diriger vers un hôtel où il pourrait rester pour la nuit, pour continuer d’aider le lendemain.

En chemin, il s’acheta une de ces fameuses glaces à l’eau de mer dont il avait entendu parlé dans plusieurs mondes. Il la dégusta tout en se rendant à l’hôtel. Une fois arrivé, il demanda si une chambre était disponible, ce à quoi on lui répondit que la dernière qui était libre se trouvait au dernier étage. Cela ne rebuta nullement le jeune homme qui paya d’avance pour la nuitée. Il monta pour se reposer un peu dans la chambre. Il y entra, s’allongea sur le lit et continua à suçoter sa glace à l’eau de mer. Il se réjouit en constatant, en arrivant à la fin, qu’il avait reçu un bâtonnet gagnant. Il pourrait donc l’échanger contre d’autres glaces plus tard.

Cependant, bien vite, il entendit des cris qui provenaient des rues alentours. Intrigué, il se releva, cessant de jouer avec le bâtonnet, et se dirigea vers la fenêtre. Il vit plusieurs habitants de la ville, qui semblaient poursuivre quelque chose. Il put entendre le mot ‘’monstre’’. Alors il se figea quelques instants. Un sans-cœur avait réussi à passer outre le système de sécurité ? Cela semblait plus qu’improbable, mais il devait vérifier. D’autant plus qu’il était sans doute un des seuls à être capable d’anéantir complètement ce sans-cœur, si sans-cœur il y avait véritablement. Et puis, après tout, il était là pour aider, non ? Alors autant qu’il se rende utile !

Il n’avait cependant pas le temps de redescendre au rez-de-chaussée, car les habitants allaient bientôt disparaître de son champ de vision. Alors il se contenta de se poster sur le rebord de sa fenêtre et sauta pour atterrir sur le toit de la maison qui se trouvait en face. Il mit quelques secondes pour récupérer son équilibre, puis il se mit à nouveau en route, suivant les habitants et se guidant avec leurs cris.

Il parvint finalement à destination et se figea. Sous lui, de multiples habitants bombardaient une étrange créature de bois, de cailloux et de tout ce qui leur tombait sous la main. Cette créature avait quelques similitudes avec le loup. Ou plus exactement, cet étrange être ressemblait fortement à un loup. Peut-être une sorte d’hybride ? De toute façon, ce n’était pas le plus important. Car il pouvait sentir, bien que faiblement, ses sens étant encore peu habitués à ce genre d’exercice, que le cœur de cette… personne ? Oui, personne, semblait diffuser une forte lumière, quasiment pure. Alors, il agit, sans forcément y réfléchir plus que cela. Tout ce qui importait, c’était de protéger cet être qui était attaqué sans raison. Alors il cria.

-Arrêtez !

Surprise par son hurlement, la foule s’arrêta quelques secondes, le temps de chercher sa provenance, avant de lever la tête. Secondes qu’il put mettre à profit pour sauter et se réceptionner tout en douceur. Il se dressa devant la foule, qui se tenait encore miraculeusement à l’arrêt. Et, pour marquer le coup, tendit son bras droit devant lui. Dans sa main apparut une clé géante qui valut un pas de recul et un murmure de la part de la masse compacte. Car, bien évidemment, ce qu’il tenait dans sa main était une keyblade. Et évidemment, aucun des protecteurs n’était là pour l’accueillir. Circonspects, les habitants ne savaient plus comment réagir. Pourquoi un porteur de keyblade protégeait-il un monstre ? L’étonnement était à son comble. Zan en profita pour reprendre la parole.

-Ce n’est pas un sans-cœur, arrêtez ! Vous étiez en train d’agresser une personne affiliée à la lumière ! Je m’en porte garant au nom de cette keyblade !

Les habitants hésitaient. Ils éprouvaient évidemment la plus grande crainte face à cet événement, car ils se contentaient de croire ce qu’ils voyaient. Et ce qu’ils voyaient, c’était un jeune porteur de Keyblade qui les avait aidés plus tôt dans la journée défendre un monstre. C’était un schéma hautement inconcevable. Et, finalement, la peur et l’instinct grégaire prirent le dessus sur le bon sens et le calme. Quelques habitants, profitant de l’anonymat accordé par la masse, lancèrent des cailloux sur Zan. Et, par mimétisme social, les autres suivirent. Le jeune homme n’eut pas d’autre choix que de dresser une barrière pour arrêter les divers projectiles. Il se pencha vers la personne qu’il venait de protéger.

-ça va, rien de cassé ? Tu es en état de courir ? Il faut partir d’ici au plus vite, mais je refuse de les blesser, ils ne sont pas des ennemis, juste des gens apeurés…

Sur ces mots, il attendit la réaction de cette étrange créature…

Dos à la foule, les mains tentant de protéger son visage, Cyn’del encaissait les coups stoïquement. Elle ne devait pas bouger, agir signifierait sans aucun doute son arrêt de mort. Pourtant, elle aurait pu, elle aurait pu se lever et laisser sa rage bestiale déborder d’un seul coup. Se tourner soudainement et sauter au cou du plus proche, les crocs rencontrant la chair tendre. D’horribles flashs de colère et de haine s’imposaient à son esprit malgré elle, image morbide d’une bête immonde regagnant sa liberté par tous les moyens. Abandonner sa dernière parcelle d’humanité et devenir ce qui se reflétaient dans les yeux haineux : un monstre… Elle n’en fit rien. Elle ne pouvait définitivement pas se résoudre à attaquer des civils, même en état de légitime défense.

Une pierre plus lourde que les autres –ou lancée avec plus de conviction- heurta lourdement sa tempe, lui arrachant un cri étouffé et la blessant jusqu’au sang qui vint rapidement maculer ses mains. Elle regarda la substance poisseuse, son sang. Il était toujours de la même couleur, ce beau rouge vermillon. Ça, ça n’avait pas changé au moins. Un cri venant des toits l’arracha à sa contemplation.

« Arrêtez ! »

Les coups cessèrent alors et tous, elle y comprit, se mirent en quête du trouble-fête. Elle ne le trouva que lorsque celui-ci sauta du bâtiment pour atterrir entre la multitude et elle. La princesse se retourna difficilement et, posée sur ses avant-bras et face à la foule, le détailla de dos. Il s’agissait d’un humain aux cheveux courts et décolorés. Il était plutôt grand et athlétique. Peut-être était-il versé dans les arts martiaux ? Quoiqu’il en soit, elle lui était reconnaissante de s’être interposé de la sorte. Son regard fut attiré par l’étrange arme qu’il venait de faire apparaître. Était-ce bien ça ? Cette arme étrange en forme de clef ?

« Ce n’est pas un sans-cœur, arrêtez ! Vous étiez en train d’agresser une personne affiliée à la lumière ! Je m’en porte garant au nom de cette keyblade ! »

L’étranger confirma de lui-même ses doutes. Un porteur de keyblade ! Une personne rarissime destiné à combattre les ténèbres venait de descendre de ce toit pour la sauver, elle, le monstre ! Des larmes de soulagement lui montèrent aux yeux, il venait de reconnaître devant témoins son humanité. Les habitants de la citée, au début septiques, reprirent cependant ce cycle de violence stupide, prenant pour cible désormais le jeune homme. Pour l’avoir protéger, il devait à son tour subit son lot de projectiles. Cyn’del remit ses mains devant son visage, autant pour échapper au spectacle que pour empêcher toute future blessure. Pourtant, aucune pierre ne les atteint, arrêtée bien avant par une force translucide. Elle retira ses mains, essayant de comprendre l’étrange phénomène. Quelque chose s’était construit et stoppait l’assaut. Un peu comme une espèce de mur…de la magie ? L’humain se retourna et se pencha vers elle, elle se recula jusqu’à atteindre le fond du cul de sac, un air apeuré sur le visage.

« Ça va, rien de cassé ? Tu es en état de courir ? Il faut partir d’ici au plus vite, mais je refuse de les blesser, ils ne sont pas des ennemis, juste des gens apeurés… »

Sa voix se voulait douce et rassurante, tout comme son regard métallique. La princesse acquiesça lentement, à défaut de pouvoir lui répondre autrement et se releva sur ses deux jambes, s’aidant du mur. De toute sa hauteur, elle le dépassait bien d’une bonne tête. Elle approcha son visage carnassier et inquiétant du sien, le regard plein de reconnaissance. La foule retenait son souffle. Le monstre allait gober d’un seul coup l’élu de la lumière et puis il viendrait sans aucun doute se venger sur eux ! Pourtant, ‘l’erreur des ténèbres’ ne lui fit rien et tordit son cou pour faire face à la multitude, qui recula d’un pas. Elle sorti ses crocs et les menaça en grognant. Puis, sans attendre son sauveur, elle se retourna et escalada le bâtiment, ses griffes effilées s’enfonçant dans la brique comme dans du beurre. Arrivée en haut, elle reprit sa démarche quadrupède et s’enfuit sans demander son reste. Sa course à travers les toits se prolongea durant de longues minutes durant lesquelles elle endommagea quelques corniches et fit tomber plusieurs tuiles sur le sol. Elle ne voulait pas être suivie, par qui que ce soit, et accéléra tout au long de sa fuite.

L’étrange créature en question se redressa et le surplomba de toute sa hauteur. Pourtant, le jeune homme ne tressaillit même pas. Il avait confiance en son instinct. Il savait qu’elle ne lui ferait aucun mal, il pouvait sentir sa lumière. Par contre, la foule ne semblait pas partager son avis, au vu des murmures qu’elle laissait échapper, laissant entendre que le jeune porteur de Keyblade était sur le point de connaître une fin aussi tragique que prématurée et douloureuse. Fin que la foule allait, par la suite, bien évidemment partager pour avoir osé défier la colère du monstre.

Pourtant, le pronostic exact s’avéra être celui du jeune voyageur. La créature – non, la personne, il ne pouvait pas penser à elle comme une simple créature – la personne, donc, se dirigea vers le mur et commença à l’escalader à l’aide de ses griffes. Le message était suffisamment clair. Elle ne voulait pas être suivie. Alors, son sauveur se contenta de garder sa barrière dressée jusqu’à ce qu’elle ait disparu. Une fois qu’elle eut disparu derrière les toits, il poussa un soupir et se prépara à affronter les foudres des citadins, alors qu’en toute logique, il aurait du être le procureur et non l’accusé. Alors, il dissipa sa barrière, après être certains qu’ils étaient maintenant calmés. Et, bien évidemment, le déluge éclata aussitôt. Il n’arrivait pas vraiment à discerner de voix précise, car tous parlaient en même temps, dans un maelström sonore qui lui faisait regretter de ne pas avoir suivi celle qu’il avait secourue. Néanmoins, il percevait tout de même l’idée générale : en gros, et pour résumer, il était soit fou, soit complètement inconscient – d’après les différentes versions – mais dans tous les cas, il était dangereux et stupide parce qu’il avait protégé un monstre alors qu’il était censé les éliminer.

Il ne tenta même pas de parler ou de placer la moindre parole que ce soit, sachant qu’il ne serait de toute façon pas écouté. Cependant, s’il semblait toujours aussi calme extérieurement, il en était tout autrement à l’intérieur. En effet, plus le temps passait et plus il bouillonnait, mourant d’envie de dresser une barrière et de les planter là au moins jusqu’à ce qu’ils n’aient plus assez de voix pour continuer à lui adresser tous leurs reproches. Bientôt, ils allaient lui reprocher le fait que Maléfique en avait fait son quartier général quelques années plus tôt, s’ils continuaient sur cette voie-là ! Finalement, il n’y tint plus. Il tendit le bras devant lui et dressa une barrière avant de faire volte-face avec un certain agacement. Qu’ils se débrouillent donc tous seuls pour l’instant et qu’ils s’enferment dans leur aveuglement ! Lui n’avait plus qu’une envie : partir. Bon, il avait tout de même un petit problème : toutes ses affaires, à part une sacoche contenant quelques affaires et qu’il gardait en permanence sur lui en cas de mauvaises surprises et de départ précipité, étaient restées à l’hôtel. Tant pis, pour l’instant, il allait simplement aller se balader. Il retournerait à l’hôtel plus tard.

Ce fut donc mécaniquement qu’il se dirigea vers les remparts de la ville, tout en essayant tant bien que mal de positiver quant à la mésaventure qu’il venait de vivre. Il avait déjà vécu pire, après tout. En l’occurrence, il savait que c’était la peur qui les avait fait agir ainsi. Le plus étrange était quand même qu’ils avaient repris leurs assauts lorsqu’il était intervenu, alors qu’il les avait sentis prêts à arrêter et à revenir à la raison. C’était cela qui était le plus étrange. En vérité, c’était comme si quelqu’un avait agi pour pousser les habitants à recommencer à s’aveugler… Il secoua la tête, son hypothèse ne tenait presque pas la route. Il s’était fait des idées, tout simplement. Ils avaient eu peur et n’avaient pas pu faire face. Cela pouvait se comprendre, surtout de la part d’un peuple, qui, il y avait encore très peu, était sous la domination de Maléfique. Le fait qu’ils fussent effrayés était dès lors facile à assimiler, même s’il était loin de tout excuser. Mais au moins la compréhension était-elle le premier pas vers la pacification et la fin de la terreur, même si faire le premier pas n’est jamais chose aisée.

Il fut cependant interrompu au milieu de ses considérations philosophiques par un hurlement effroyable et déchirant, qui lui donna l’impression que son âme venait de sombrer dans des abysses insondables. Il frissonna. Pourtant, instinctivement, il sentit que ce hurlement était un appel à l’aide. Alors, il commença à courir en espérant ne pas arriver trop tard. Car il avait l’impression qu’une catastrophe se produirait s’il n’arrivait pas dans les temps. Un mauvais pressentiment auquel il ne pouvait s’empêcher de prêter attention, ne sachant donc absolument pas à quoi s’attendre.

Finalement, la personne qui avait poussé ce cri n’était pas loin, si bien qu’il put l’atteindre en moins d’une minute. En d’autres circonstances, il aurait peut-être pu esquisser un sourire amusé en voyant qui avait besoin de son aide. Mais actuellement, l’heure n’était pas à l’amusement. Pas encore, du moins. Car il était encore trop loin pour pouvoir protéger efficacement la personne qu’il avait déjà protégée quelques minutes plus tôt. Et les sans-cœur l’attaquaient. Alors, il agit simplement par réflexe. Il invoqua dans une main sa keyblade et dans l’autre, son arc. Et il plaça sa keyblade comme une flèche, tendant la corde. Il prit une inspiration et tira en relâchant la corde. L’un des monstres fut touché et détruit immédiatement, tandis que les autres se tournaient vers le nouveau venu, qui fit disparaître son arc et réinvoqua sa keyblade dans sa main. Puis il se lança au contact, fauchant rapidement les monstres.

Quelques secondes plus tard, le combat était terminé et il ne restait plus de trace des sans-cœur. Il se tourna donc vers l’étrange personne et eut un petit sourire rassurant avant de prendre la parole, un rire dans les yeux.

-ça fait deux fois que je te sauve en quelques minutes, j’espère que ça ne va pas devenir une habitude. Ça va, ils ne t’ont rien fait ?

Puis une pensée le traversa.

-Euh… Je sais que tu me comprends, mais est-ce que tu peux communiquer ? ça serait tout de même plus pratique, non ? Parce que tu ne sembles pas être en grande forme là, mais je ne sais pas si c’est dû à… à ton apparence, ou autre chose, donc je ne sais pas ce que je peux faire pour t’aider.